LUCAS RATTON
" Des animaux représentés"
PAR ELSA MIMRAM - Septembre 2015
En peintures ou en sculptures, les animaux sont de tout temps et partout représentés, des parois préhistoriques de la grotte de Lascaux, aux vitraux en papillons de Damien Hirst. Mais cela est d’autant plus prégnant lorsqu’il s’agit des productions rituelles, qu’elles soient africaines ou d'autres continents. Objets ou supports de rites, ces sculptures sont datées dans leur grande majorité de la fin du XIXe siècle ou du début du XXe siècle. Ces objets sont des masques que l’on pressent protecteurs, des cimiers aux allures féroces, des statuettes anthropomorphes portant des animaux comme l’on porte un enfant, ou des animaux sur pattes consacrés par des charges ou désacralisés. Bien qu’elles répondent à des critères de représentations codifiés selon les rites, les formes nous paraissent libres, elles épousent leur fonction. Leurs qualités esthétiques garantissent l’efficacité de leurs pouvoirs.
Les « Animaux » évoquent alors le rapport à l’animal dans leur construction rituelle, sous des aspects très divers. Ici, l’animal n’est pas l’objet d’une domestication. Il est au centre de différentes cosmogonies, il est un support moral, il permet la cohésion sociale. Il diffère beaucoup du rapport occidental à l’animal, que l’on retrouve très fréquemment dans les productions artistiques contemporaines, ou plus anciennes. La représentation de l'animal dépend évidemment de la société qui la produit. Elle peut, schématiquement, se diviser en une typologie simple : les représentations d'animaux dans les sociétés où la cité domine, et les représentations d'animaux dans les sociétés à majorité rurale.
Les « Animaux » évoquent alors le rapport à l’animal dans leur construction rituelle, sous des aspects très divers. Ici, l’animal n’est pas l’objet d’une domestication. Il est au centre de différentes cosmogonies, il est un support moral, il permet la cohésion sociale. Il diffère beaucoup du rapport occidental à l’animal, que l’on retrouve très fréquemment dans les productions artistiques contemporaines, ou plus anciennes. La représentation de l'animal dépend évidemment de la société qui la produit. Elle peut, schématiquement, se diviser en une typologie simple : les représentations d'animaux dans les sociétés où la cité domine, et les représentations d'animaux dans les sociétés à majorité rurale.
Urbain vs rural ?
Une tendance à créer des dichotomies nous amène souvent à former des systèmes binaires. C’est notamment ce qui se produit lorsqu’il s’agit d’analyser notre rapport à la nature, et aux animaux, qu’ils soient sauvages ou domestiqués. Ainsi, notre premier réflexe est d’établir cette opposition très « classique » en anthropologie entre Nature et Culture, de scinder deux espaces symboliques où le Sauvage s’oppose au Civilisé. Un « Etat de Nature » a longtemps été aux fondements d’une philosophie évolutionniste raciale et raciste. Il n’existe pas, ni en Afrique, ni ailleurs ; et bien que cet état soit fantasmé, il existe indéniablement un rapport fort à l’animal qui s’exprime dans les productions de sculptures rituelles. Il diffère beaucoup du rapport occidental à l’animal.
En Europe, l’espace a été rationnellement sectionné, avec une volonté forte de maitriser et dominer les éléments naturels. L’animal a été rejeté aux frontières de la Cité, à tel point que les écosystèmes ont été progressivement bouleversés au profit d’un ordre où l’humain domine en toute puissance… jusqu’à un point de rupture impliquant changement climatique et bouleversement écologique. Le déséquilibre devenu trop important, l’élément naturel doit être réintégré dans un espace de cohabitation au risque d'un déséquilibre allant croissant. L'Homme et l'Animal ont progressivement été envisagés comme deux opposés, dont la Raison de l'un octroie Supériorité sur l'autre. L'animal est exploité, voir exterminé.
Il convient de revenir très brièvement sur ce rapport à l'animal qui se retrouve dans la production artistique occidentale. Cela nous permet de comprendre à quel point il faut s'éloigner de nos schèmes de pensée pour pouvoir envisager de comprendre l'ensemble d'artefacts animaliers que l'on retrouve dans nos musées d'art tribal. En effet, le rapport à l'animal y contraste radicalement. Les artistes occidentaux présentent alors un rapport à l'animal sous forme d'opposition et de dualité. Pour Hirst par exemple, les zèbres, veaux et autres requins se retrouvent tranchés nets dans le formol, les chiens chromés de Koons chosifient l’univers animal, le bestiaire naturalisé de Cattelan, littéralement planté dans le décor, interroge sur sa place et nos possibles identifications à l’animal, alors que Fabre choisit de facetter ses formes en carapaces de scarabées…
En Europe, l’espace a été rationnellement sectionné, avec une volonté forte de maitriser et dominer les éléments naturels. L’animal a été rejeté aux frontières de la Cité, à tel point que les écosystèmes ont été progressivement bouleversés au profit d’un ordre où l’humain domine en toute puissance… jusqu’à un point de rupture impliquant changement climatique et bouleversement écologique. Le déséquilibre devenu trop important, l’élément naturel doit être réintégré dans un espace de cohabitation au risque d'un déséquilibre allant croissant. L'Homme et l'Animal ont progressivement été envisagés comme deux opposés, dont la Raison de l'un octroie Supériorité sur l'autre. L'animal est exploité, voir exterminé.
Il convient de revenir très brièvement sur ce rapport à l'animal qui se retrouve dans la production artistique occidentale. Cela nous permet de comprendre à quel point il faut s'éloigner de nos schèmes de pensée pour pouvoir envisager de comprendre l'ensemble d'artefacts animaliers que l'on retrouve dans nos musées d'art tribal. En effet, le rapport à l'animal y contraste radicalement. Les artistes occidentaux présentent alors un rapport à l'animal sous forme d'opposition et de dualité. Pour Hirst par exemple, les zèbres, veaux et autres requins se retrouvent tranchés nets dans le formol, les chiens chromés de Koons chosifient l’univers animal, le bestiaire naturalisé de Cattelan, littéralement planté dans le décor, interroge sur sa place et nos possibles identifications à l’animal, alors que Fabre choisit de facetter ses formes en carapaces de scarabées…
Ces représentations semblent symboliques de toute une production artistique qui évoque la frontière entre le monde Humain et le monde Animal. On ne peut que constater l'immense contraste avec la mise en scène des masques buffles chez les Baoulé de Côte d'Ivoire, sortis lors d'occasions spécifiques en tant que protecteurs, les patines sacrificielles des « Békré » Baoulé, qui ne peuvent que témoigner de la déférence envers ces représentations de singes mendiants, ou encore les diverses représentations animales dominant les masques de différentes ethnies, comme autant de gardiens et d'évocations de certains pans de mythes.
Les quelques exemples, choisis parmi tant d'autres possibles chez des artistes contemporains, mettent en perspective un rapport certes rituel, mais où l'animal est en quelque sorte désacralisé. La mise en scène d'une dualité franchement établie est liée à un éloignement du monde animal. Un rapport de proximité avec la nature semble amener les artistes à représenter les animaux avec plus de « libertés » dans les solutions plastiques envisagées.
Les quelques exemples, choisis parmi tant d'autres possibles chez des artistes contemporains, mettent en perspective un rapport certes rituel, mais où l'animal est en quelque sorte désacralisé. La mise en scène d'une dualité franchement établie est liée à un éloignement du monde animal. Un rapport de proximité avec la nature semble amener les artistes à représenter les animaux avec plus de « libertés » dans les solutions plastiques envisagées.
Le sacré au centre du processus de représentations
Le lien au sacré nécessite, dans les religions faisant appel aux représentations plastiques, une multitude d'adjuvants symboliques, bien souvent représentés sous des formes picturales assez libres. Si l'on regarde par exemple certains manuscrits religieux du Moyen-Âge, dans des sociétés majoritairement chrétiennes et où la frontière entre la cité et la campagne est beaucoup plus poreuse, on trouve des représentations de l'Homme et de l'Animal où les comportements sont mimétiques, où les chimères et autres hybrides sont très présents et où l'animal personnifie des qualités ou des défauts humains. C'est également le cas de certains tableaux de Bruegel ou encore de Bosch, dans son « Jardin des Délices » par exemple. Mais ne nous y méprenons pas, l'exemple de ces manuscrits et tableaux permet d'illustrer un certain rapport au sacré et à la proximité « morale » des animaux. Il n'implique en aucune façon que les productions rituelles puissent être comparées à des productions moyenâgeuses. Il s'agit ici d'indiquer qu'un changement de mode de vie modifie la nature même du contenu des productions plastiques sur un même sujet, et ce, dans une tendance globale.
La Cité se coupe de la Nature, elle érige des murs. Cet éloignement s'est souvent effectué en synchronie avec une propension à l’agnosticisme grandissant des sociétés occidentales dites « modernes ». Un rapport de proximité avec la nature semble amener les artistes à représenter les animaux avec plus de « libertés ». Plus l’homme érige les murs de ses cités, plus les formes du signifié et du signifiant semblent immuables, plus l’animal est présenté dans sa forme immédiatement perceptible, et non plus pour ses qualités ou ses vices supposés.
Les formes des manuscrits tout comme les formes « tribales » semblent souvent sortir franchement des cadres naturalistes de la représentation.
La Cité se coupe de la Nature, elle érige des murs. Cet éloignement s'est souvent effectué en synchronie avec une propension à l’agnosticisme grandissant des sociétés occidentales dites « modernes ». Un rapport de proximité avec la nature semble amener les artistes à représenter les animaux avec plus de « libertés ». Plus l’homme érige les murs de ses cités, plus les formes du signifié et du signifiant semblent immuables, plus l’animal est présenté dans sa forme immédiatement perceptible, et non plus pour ses qualités ou ses vices supposés.
Les formes des manuscrits tout comme les formes « tribales » semblent souvent sortir franchement des cadres naturalistes de la représentation.
Les animaux, supports de mythes

Le corpus des sculptures animales est très vaste puisque ces dernières sont présentes à travers les continents, et sous des formes quasiment aussi variées qu’il y a de régions stylistiques et d’ethnies. En Afrique, le rapport à l'animal s'établit selon des rites et représentations permettant l'identification ou l'analogie. Ainsi, l'initié se reconnaît dans l’une des caractéristiques d'un animal, voire dans l'animal en son ensemble, ce qui permet de constituer son identité. Il établit des ressemblances, des caractéristiques communes avec l'animal qu'il invoque. En effet, avec une place prépondérante du religieux dans la construction du social, l'animal se ressent comme un adjuvant de l'Homme, craint et respecté, représentant de l'ordre moral. Ses représentations ne le mettent pas uniquement en confrontation avec l'Homme. Il est bien plus souvent lié aux Hommes : dans la composition même des masques et des costumes où visages humains se confondent avec des éléments animaux, où les parures de prestige utilisent les plus beaux atours des parures animales et magnifient stylistiquement et symboliquement leur porteur.
La représentation rituelle illustre et actualise un certain nombre de mythes. Elle évoque un ensemble de préceptes à suivre ou proscrire. Et souvent, ce sont les animaux qui servent de messagers dans les sociétés initiatiques et dans les confréries religieuses. Ils prennent également parfois la forme de génies ou divinités incarnant les puissances des éléments avec lesquelles l'Homme doit moduler au quotidien. Les animaux sont également garants d’une justice divine, de paix, de protection, tout comme ils peuvent symboliser la fécondité ou évoquer des notions plus abstraites, comme celle de liberté.
Les animaux parent des sculptures sous forme de motifs en ronde bosse ou gravés, ils sont sculptés sur pied ou masquent les danseurs de différents rites. Les animaux des masques transforment directement leur porteur en animal, ou leur accordent force et protection en étant situés au-dessus d'un visage humain.
En ce qui concerne les sculptures qui transforment leur porteur en animal, citons notamment les fameuses gazelles « Tyiwara » Bambara du Mali. Ces cimiers symbolisaient un animal le plus souvent hybride, protecteur des récoltes. Les cimiers étaient portés en couple lors de cérémonies organisées pour fertiliser la terre ou pendant les récoltes pour encourager les cultivateurs. Les danseurs se rendaient traditionnellement aux champs parés des attributs « Tyiwara », cimiers, habits de danse et cannes rituelles. Plusieurs styles de cimiers « Tyiwara » combinent différents animaux selon leurs origines : les gazelles horizontales, du style de « Bamako » représentent principalement l’hippotragus equinus, ou antilope cheval, aux longues cornes tendues et recourbées alors que certaines gazelles verticales sont du style de « Bougouni ». Les animaux représentés sont alors l’hippotragus equinus, associé au manis tricuspis, ou pangolin, enroulé sur lui-même. Les masques singes Bambara ou les masques « Zamble » de l'ethnie Gouro participent au même type d'identification à l'animal. Citons enfin les masques Sénoufo de Côte d'Ivoire, dits « cracheur de feu », qui condensent plusieurs animaux : figures hybrides mêlant le visage et les cornes de l'antilope à la mâchoire de la hyène, aux crocs de crocodile, surmontée de défenses de phacochères, les traces de kaolin pourraient enfin suggérer la robe tachetée du léopard. Le porteur jouait le rôle d'intermédiaire entre le monde des hommes et l'univers céleste, en se masquant lors du rite.
Certains masques sont surmontés d'animaux. C'est notamment le cas des impressionnants et très expressifs masques Bamoun du Grassland Camerounais. Sur certains d’entre eux, une araignée tisse une forme tentaculaire sur le sommet de leur crane. Elle semble constituer l’image du cerveau du personnage représenté. Les masques Yaka du Congo sont accompagnés d’antilopes stylisées, alors qu’en Côte d’Ivoire, au-dessus des masques Sénoufo, Yahouré et Baoulé, ce sont les oiseaux qui sont le plus souvent présents. On trouve en effet chez plusieurs ethnies africaines, particulièrement en Afrique de l’Ouest, la présence récurrente du Calao. En tant qu’oiseau de bon augure par excellence, il symbolise, entre autres, la fécondité, la prospérité, la connaissance et la protection.
La représentation rituelle illustre et actualise un certain nombre de mythes. Elle évoque un ensemble de préceptes à suivre ou proscrire. Et souvent, ce sont les animaux qui servent de messagers dans les sociétés initiatiques et dans les confréries religieuses. Ils prennent également parfois la forme de génies ou divinités incarnant les puissances des éléments avec lesquelles l'Homme doit moduler au quotidien. Les animaux sont également garants d’une justice divine, de paix, de protection, tout comme ils peuvent symboliser la fécondité ou évoquer des notions plus abstraites, comme celle de liberté.
Les animaux parent des sculptures sous forme de motifs en ronde bosse ou gravés, ils sont sculptés sur pied ou masquent les danseurs de différents rites. Les animaux des masques transforment directement leur porteur en animal, ou leur accordent force et protection en étant situés au-dessus d'un visage humain.
En ce qui concerne les sculptures qui transforment leur porteur en animal, citons notamment les fameuses gazelles « Tyiwara » Bambara du Mali. Ces cimiers symbolisaient un animal le plus souvent hybride, protecteur des récoltes. Les cimiers étaient portés en couple lors de cérémonies organisées pour fertiliser la terre ou pendant les récoltes pour encourager les cultivateurs. Les danseurs se rendaient traditionnellement aux champs parés des attributs « Tyiwara », cimiers, habits de danse et cannes rituelles. Plusieurs styles de cimiers « Tyiwara » combinent différents animaux selon leurs origines : les gazelles horizontales, du style de « Bamako » représentent principalement l’hippotragus equinus, ou antilope cheval, aux longues cornes tendues et recourbées alors que certaines gazelles verticales sont du style de « Bougouni ». Les animaux représentés sont alors l’hippotragus equinus, associé au manis tricuspis, ou pangolin, enroulé sur lui-même. Les masques singes Bambara ou les masques « Zamble » de l'ethnie Gouro participent au même type d'identification à l'animal. Citons enfin les masques Sénoufo de Côte d'Ivoire, dits « cracheur de feu », qui condensent plusieurs animaux : figures hybrides mêlant le visage et les cornes de l'antilope à la mâchoire de la hyène, aux crocs de crocodile, surmontée de défenses de phacochères, les traces de kaolin pourraient enfin suggérer la robe tachetée du léopard. Le porteur jouait le rôle d'intermédiaire entre le monde des hommes et l'univers céleste, en se masquant lors du rite.
Certains masques sont surmontés d'animaux. C'est notamment le cas des impressionnants et très expressifs masques Bamoun du Grassland Camerounais. Sur certains d’entre eux, une araignée tisse une forme tentaculaire sur le sommet de leur crane. Elle semble constituer l’image du cerveau du personnage représenté. Les masques Yaka du Congo sont accompagnés d’antilopes stylisées, alors qu’en Côte d’Ivoire, au-dessus des masques Sénoufo, Yahouré et Baoulé, ce sont les oiseaux qui sont le plus souvent présents. On trouve en effet chez plusieurs ethnies africaines, particulièrement en Afrique de l’Ouest, la présence récurrente du Calao. En tant qu’oiseau de bon augure par excellence, il symbolise, entre autres, la fécondité, la prospérité, la connaissance et la protection.
Le prestige et les animaux

Un grand nombre d’objets de prestige, qui pour certains avaient une fonction utilitaire, sont parés d'animaux. C’est notamment le cas de boites à fard ou « à souris », ainsi que de certains frottoirs à divination Kuba. D’autres possédaient simplement une immense valeur intrinsèque.
C’est le cas de cette superbe plaque de bronze du Bénin, représentant deux poissons chats entrelacés. Le Royaume de Bénin, situé au Sud de l’actuel Nigéria, produisait un art réservé au roi, ainsi qu’à sa cour. Le culte voué au dieu de la mer Olokun était d’une importance majeure dans les rites liés à la royauté sacrée du Bénin. La figure symbolique des poissons lie le royaume terrestre de l’Oba, au royaume maritime d’Olokun. La sculpture était probablement utilisée en parure vestimentaire distinctive ou en tant qu’objet d’autel. On trouve un objet de ce type notamment au British Museum, à Londres.
Notons enfin que les sculptures ne sont souvent que partielles. Au Congo, le roi Kuba notamment se présentait masqué, paré de la tête aux pieds, trônant assis. Il portait le masque royal « Moshamboowy » qui, en lui-même, symbolisait le personnage du roi. Son costume était très complexe, puisqu'il était composé d'une multitude d'ornements : des pagnes, de nombreux rangs de ceintures, des ornements de cou, d'épaules, des bandes de peaux d'animaux, et cette haute coiffe à motifs en damiers surmontée d'un ensemble de plumes formant une parure spectaculaire, rare, couteuse et prestigieuse. Le roi ainsi paré apparaissait comme une création chimérique, à la jonction de l'humain et de l'animal, impressionnant dans son costume qui lui donnait une dimension surnaturelle.
En ce qui concerne les masques, ils étaient toujours portés avec un costume qui recouvrait intégralement le danseur, dans la majorité des cas. Cela permettait au danseur d'incarner l'élément du mythe, et au regardeur de visualiser la mascarade comme une actualisation bien vivante de la tradition dont il était issu, mais dont l'Homme ne serait que le passeur, rendu quasiment invisible par un amas de fibres végétales, animales, de plumes, de cauris, etc. En occident, la forme du masque ou de l'animal solitaire, dénués de ses ornements, a le plus souvent été privilégiée. Les sculptures rapportées en occident étaient les plus souvent dépossédées de leurs parures, ces éléments étant susceptibles de vieillir et s'abimer. Elles étaient également enlevées au profit d'une esthétique plus épurée.
Les sculptures d'animaux dans les cultures tribales sont séduisantes : par leur histoire, liée au prestige des chefs et aux mythes si riches et variés, et bien évidemment par leurs formes. Ils ne sont plus porteurs de leur sens originel, mais gageons que ces formes anciennes continueront à porter du sens sur notre regard sur l’environnement et la relation que nous entretenons avec l’animal.
C’est le cas de cette superbe plaque de bronze du Bénin, représentant deux poissons chats entrelacés. Le Royaume de Bénin, situé au Sud de l’actuel Nigéria, produisait un art réservé au roi, ainsi qu’à sa cour. Le culte voué au dieu de la mer Olokun était d’une importance majeure dans les rites liés à la royauté sacrée du Bénin. La figure symbolique des poissons lie le royaume terrestre de l’Oba, au royaume maritime d’Olokun. La sculpture était probablement utilisée en parure vestimentaire distinctive ou en tant qu’objet d’autel. On trouve un objet de ce type notamment au British Museum, à Londres.
Notons enfin que les sculptures ne sont souvent que partielles. Au Congo, le roi Kuba notamment se présentait masqué, paré de la tête aux pieds, trônant assis. Il portait le masque royal « Moshamboowy » qui, en lui-même, symbolisait le personnage du roi. Son costume était très complexe, puisqu'il était composé d'une multitude d'ornements : des pagnes, de nombreux rangs de ceintures, des ornements de cou, d'épaules, des bandes de peaux d'animaux, et cette haute coiffe à motifs en damiers surmontée d'un ensemble de plumes formant une parure spectaculaire, rare, couteuse et prestigieuse. Le roi ainsi paré apparaissait comme une création chimérique, à la jonction de l'humain et de l'animal, impressionnant dans son costume qui lui donnait une dimension surnaturelle.
En ce qui concerne les masques, ils étaient toujours portés avec un costume qui recouvrait intégralement le danseur, dans la majorité des cas. Cela permettait au danseur d'incarner l'élément du mythe, et au regardeur de visualiser la mascarade comme une actualisation bien vivante de la tradition dont il était issu, mais dont l'Homme ne serait que le passeur, rendu quasiment invisible par un amas de fibres végétales, animales, de plumes, de cauris, etc. En occident, la forme du masque ou de l'animal solitaire, dénués de ses ornements, a le plus souvent été privilégiée. Les sculptures rapportées en occident étaient les plus souvent dépossédées de leurs parures, ces éléments étant susceptibles de vieillir et s'abimer. Elles étaient également enlevées au profit d'une esthétique plus épurée.
Les sculptures d'animaux dans les cultures tribales sont séduisantes : par leur histoire, liée au prestige des chefs et aux mythes si riches et variés, et bien évidemment par leurs formes. Ils ne sont plus porteurs de leur sens originel, mais gageons que ces formes anciennes continueront à porter du sens sur notre regard sur l’environnement et la relation que nous entretenons avec l’animal.
Elsa Mimram